La Principauté lance un cycle de formations dédié à l’IA pour accompagner les entreprises locales. Une stratégie économique ambitieuse portée par le Gouvernement princier.
C’est dans les locaux de MonacoTech, l’incubateur créé en partenariat avec Xavier Niel, que s’est tenue jeudi 4 décembre une session Digital FlashUP consacrée à l’intelligence artificielle. Ce rendez-vous matinal, organisé par le programme Extended Monaco Entreprises en partenariat avec le Monaco Business Office, marque un élément de la thématique majeure de 2026 pour l’économie de la Principauté : l’IA au service des entreprises.
Devant une assemblée de dirigeants et d’entrepreneurs monégasques réunis dès 8 heures autour d’un petit-déjeuner, Florent Rudolf, expert en transformation numérique, a posé les bases d’une utilisation raisonnée de ces nouveaux outils. Son message : l’IA est un assistant remarquable capable de produire des brouillons de grande qualité, mais l’intervention humaine reste indispensable pour atteindre l’excellence.

« Ne jamais faire confiance aveuglément »
L’intervenant a insisté sur les bonnes pratiques : proscrire l’utilisation de données confidentielles, veiller à la qualité des informations transmises aux modèles, et surtout relire et valider systématiquement les résultats obtenus. « On arrive généralement à 80 ou 90 % du résultat souhaité, mais atteindre les 100 % demeure très compliqué », a-t-il reconnu, invitant les participants à « itérer une fois, deux fois, trois fois » jusqu’à obtenir un rendu satisfaisant.

Interrogé sur un éventuel classement entre les différents modèles disponibles sur le marché — ChatGPT, Gemini, Claude ou encore le français Mistral —, Florent Rudolf a refusé de trancher. « C’est une question piège », a-t-il répondu avec le sourire. Chaque outil présente des spécificités : ChatGPT excelle dans le traitement textuel, Gemini se distingue pour les recherches historiques, Claude s’impose dans le développement informatique. Sa recommandation : interroger plusieurs IA simultanément et comparer leurs réponses.
L’IA comme levier de valeur ajoutée
Parmi les témoignages d’entrepreneurs, celui de M. Vacher, actionnaire de la société Hydro Concept, spécialisée dans la conception de spas sur mesure pour l’hôtellerie de luxe, illustre la diversité des approches. L’entreprise monégasque ne voit pas dans l’IA un instrument d’économie d’échelle, mais plutôt un moyen d’apporter une valeur ajoutée supplémentaire à ses clients exigeants.
Cette vision pragmatique rejoint la stratégie gouvernementale exposée par Diego Bonaventura, chargé de mission au sein de la cellule économie numérique à la Délégation interministérielle chargée de la transition numérique. Le responsable a rappelé l’existence d’un parcours d’accompagnement en quatre étapes accessible à toutes les entreprises de la Principauté : un audit de maturité numérique, une plateforme de mise en relation avec des experts locaux, le Fonds Bleu — un dispositif de cofinancement gouvernemental pouvant couvrir jusqu’à 70 % des projets de transformation digitale — et des sessions de sensibilisation.
Un modèle unique en Europe
Depuis son lancement fin 2020, le Fonds Bleu a accompagné plus de 700 projets de transformation numérique pour un montant de 24,3 millions d’euros d’aides, générant selon les chiffres officiels plus de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires supplémentaire pour les entreprises bénéficiaires. Le budget alloué au numérique par la Principauté représente près de 400 euros par habitant, l’un des ratios les plus élevés d’Europe.
Monaco dispose par ailleurs d’infrastructures que peu de pays européens peuvent revendiquer : un cloud souverain opérationnel, la 5G déployée sur l’ensemble du territoire, une identité numérique pour les résidents. Monaco Digital travaille déjà avec Microsoft et IBM sur une IA souveraine garantissant la localisation des données sur le territoire.
Florent Rudolf a néanmoins appelé à la vigilance. « La Chine fait des choses impressionnantes en matière d’IA », a-t-il observé, encourageant Monaco à surveiller ces avancées. Tout en mettant en garde : « Il faut des garde-fous. Il ne faut pas non plus déshumaniser tout ce qui est fait. » Un équilibre délicat que la Principauté entend trouver en plaçant l’humain au centre de sa révolution numérique.
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