Monaco, Politique 9 février 2017

Dernière ligne droite pour pour les élections du Conseil National monégasque

by admin

La campagne électorale monégasque pour le renouvellement ou la reconduction des 24 élus du Conseil National s’achève. Trois listes  sont actuellement en lice pour le scrutin qui a lieu le 11 février 2018 en Principauté de Monaco qui va désigné les nouveaux membres du Conseil National, les spécificités de cette élection sont nombreuses.

Premier point particulier: il n’y a pas de femme ou d’homme dont la carrière est exclusivement politique. Tous les candidats sont issus de la société civile. Il peut aussi bien s’agir de chirurgiens, de professeurs, d’assistantes sociales, que de dirigeants de société ou de salariés.

Les frais de campagnes sont plafonnés à 320 000 euros, leur remboursement est effectué à 80% dès lors que la liste obtient plus de 10% des voix, en outre aucun sondage n’est réalisé.

Enfin, lors de la dernière semaine de campagne, le gouvernement prend en charge la mise en oeuvre d’un meeting par liste. Les soirées y sont attribuées par tirage au sort. Et l’usage veut que chaque tête de liste, accompagnée d’une partie de ses colistiers assistent aux meetings de ses adversaires. Cela n’empêche pas, à l’encontre des têtes de liste concurrentes, les « Punchline » qui peuvent être redoutables lors des discours des candidats.

Les programmes reprennent quasiment les mêmes thèmes principaux: le logement, l’ emploi des Monégasques, l’ Europe, les avancées sociales, mais ne ceux-ci sont traités avec des nuances significatives qui créent des démarcations sans ambiguïté entre chaque liste. Chacune présente en effet un programme en  cent points, qui touchent en outre une large palette de sujets ayant trait à la vie quotidienne des Monégasques, du télé-travail aux problèmes de circulation, les enjeux urbanistiques ou la vie culturelle entre autres.

Trois listes sont en compétition.

La liste Union Monégasque présente à sa tête Jean-Louis Grinda. Directeur de l’Opéra de Monte-Carlo cette liste est  composée de cinq membres du Conseil National sortants et de 19 candidats. Au cours de cette campagne Jean Louis Grinda s’est affirmé comme le candidat d’ouverture, le candidat aux solutions parfois différentes. Et, abstraction faite d’Horizon Monaco, les caciques d’Union Monégasque se considèrent dans une position de « challengers » face à Stéphane Valeri.

Jean-Louis Grinda se positionne en homme d’élégance attentif à la culture. Premier à se déclarer candidat, une alliance avec Horizon Monaco envisagée un temps ayant avorté, il  conduisit durant quelques semaines la présentation d’une liste complète de 24 candidats. Porteur de visions d’avenir, attentif, il a réalisé des débats par le Facebook du groupe politique Union Monégasque, proposé de déplacer le stade Rainier III en front de mer sur une nouvelle extension, afin d’utiliser la surface gagnée en logements.  Pour ses concurrents certaines de ses propositions sont considérées comme iconoclastes. Mais, il fit preuve d’une combativité qui en étonna plus d’un pendant la campagne, et lors du débat qui l’opposa à Stéphane Valeri, sa prestation fut plus que réussie.

S’ il est élu Président du Conseil National, pour son action future, le point mis en avant est un slogan  » Voir Grand » , ce qui résume d’ailleurs fort bien son programme et sa volonté.

Un autre groupe se présente sous le nom Horizon Monaco avec comme tête de liste une femme,  Béatrice Fresko-Rolfo. Considérée au début de la campagne comme la plus à même de gagner les élections, elle a l’atout d’être la première femme à prendre la tête d’une liste pour les élections nationales » et considère, à juste titre, que « Porter une femme à la tête du Conseil national sera un signal fort envoyé au monde entier ». Charismatique au sein de son groupe et dans ses contacts électoraux, elle n’arrive toutefois pas à utiliser pleinement ces capacités  ni lors du dernier meeting ni avec la presse nationale.

Lors de cette campagne Béatrice Fresko-Rolfo est épaulée  par Claude Boisson , conseiller national expérimenté, qui a accompli un parcours sans fautes. Avec l’appui de ses colistiers, il a inlassablement travaillé à la réussite de ce groupe.
Par contre, les urnes le confirmeront ou l’infirmeront, Béatrice Fresko-Rolfo a été déstabilisée dans le cadre du débat à trois qui devait être tenu. Tandis que Jean-Louis Grinda, initiateur du concept souhaitait avant tout débattre, que cela fut à deux ou à trois, Stéphane Valeri, tête de liste du troisième groupe, voulut, habilement, imposer un débat entre chaque candidat. Finalement seul un débat entre Jean-Louis Grinda et Stéphane Valeri eut lieu. Et il se pourrait qu’il s’agisse du tournant de cette campagne pour le groupe Horizon Monaco.

Une fois Présidente du Conseil National, Béatrice Fresko-Rolfo résume ainsi sa priorité:  « Ma liste sera celle de la probité morale et de la transparence pour oxygéner la vie politique monégasque ». Son engagement : « L’Etat doit apprendre à mieux gérer ».

Troisième en lice,  Primo, acronyme de Priorité Nationale Monaco, est menée par Stephane Valeri. Ancien Président du Conseil National pendant 7 ans, puis membre du gouvernement aux Affaires sociales durant 7 ans et demi, il a quitté ce poste le 31 mai 2017. Le 15 juin, à un confrère de Monaco Hebdo qui lui demandait « Vous allez aussi  vous relancer en politique? » Stephane Valeri déclara: « Ma première priorité, c’est de réussir le développement du groupe Monaco Communication ».

Un peu plus de trois mois plus tard, Stéphane Valeri  était la  tête de liste de Priorité Monégasque. Son expérience dans la communication lui est pour le moins profitable. Sa campagne est puissamment organisée, avec Pin-Doctor et une présence forte dans les colonnes de la presse locale. C’est un candidat à la personnalité complexe, extrêmement méthodique dans son action, dévoué entièrement à l’idée d’une politique tournée vers un certain âge d’or de Monaco. Ce dernier point est peut-être, toute proportion gardée, son talon d’Achille.

Sa campagne à l’américaine conjugue importants moyens financiers, un site web efficace avec de nombreuses présentations vidéo des événements des candidats, ainsi que des articles sur les priorités politiques du groupe, et une parité toute relative de 8 femmes pour 24 candidats. Lors du meeting du 18 Décembre à l’espace Léo Ferré, le groupe fit une démonstration de force en annonçant et répétant à l’envi que 800  personnes étaient présentes (ce qui correspond peu ou prou à 15% du corps électoral monégasque). L’estimation est peut-être optimiste, certes. Il n’en demeure pas moins qu’en assénant ses priorités que sont le logement, le refus d’entériner une négociation avec l’Europe qui porte la moindre atteinte aux statuts des Monégasques, Stéphane Valeri revendique la volonté d’être un homme fort et le président d’un Conseil National fort.

Pendant son intervention lors de la clôture du meeting de vendredi soir, il l’a d’ailleurs répété. Les discours de ses colistiers furent d’ailleurs d’ une teneur fortement anxiogène. Stéphane Valeri y confirma ses prises de position précédentes, les objectifs majeurs du programme logement, la priorité sans concessions aux Monégasques, l’extrême prudence face à l’Europe.

Pour ses adversaires, il s’agit d’une position de repli face au monde, peu propice aux intérêts de la Principauté. Mais les concurrents de Stéphane Valeri critiquent surtout sa lecture de la constitution monégasque, une lecture qui, selon eux, n’est pas conforme, et opère un glissement vers un système monarchique parlementaire, ce à quoi ils s’opposent avec force.

Quant aux frais de campagne seule l’Union Monégasque a répondu en toute transparence à notre question en annonçant 110000 euros de dépenses engagées.

Jean Cousin